Article المقال ( Janvier )
La Quinta da regaleira
Une architecture franc-maçonne au cœur du Portugal
Écrit par : Dr. Yasmin HAGGAG.
Maître de conférences.
Département de Langue et de
Littérature Françaises.( DLLF )
Université d'Alexandrie.
Palais et Jardins de la Quinta da Regaleira
Le palais et les jardins de la Quinta da Regaleira situés à Sintra, à une
demie heure en train de la capitale Lisbonne, sont des plus visités au
Portugal. La promesse d’une échappée enchantée au cœur des légendes est tenue
dès le premier pas après avoir franchi le portail. Mais il faudra être un peu
plus attentif pour comprendre que ce chef-d’œuvre architectural est la
manifestation d’un parcours franc-maçon d’exception. Quelle est l’histoire de
ce domaine déclaré en 1995 « Patrimoine de l’Humanité » par
l’Unesco ? Que cachent ces jardins, ces édifices et ces statues ?
Tout comme le lieu, son propriétaire est un homme exceptionnel : celui
qu’on appelle « L’homme aux millions ». Le millionnaire
brésilo-portugais Carvalho Monteiro (1848-1920), amateur de culture, grand collectionneur,
scientifique, amoureux d’histoire et de mythes, décide de recréer chez lui tout
un univers qui embarque le visiteur dans un voyage d’initiation d’où il devrait
ressortir transformé.
Antonio Augusto Monteiro
Monteiro a hérité de son père une fortune acquise grâce au commerce du café
au Brésil. Il la consacre à la satisfaction de sa curiosité et de ses caprices.
Avec son ami l’architecte italien Ligui Manini, il entreprend la transformation
des jardins de son palais gothique en une promenade entre enfer et paradis. A
première vue, le promeneur croirait se prêter à un agréable après-midi dans la
nature, entourée d’une végétation épaisse et des chants des oiseaux de toutes
sortes. Mais peu à peu, il est pris par le mystère des lieux et transporté dans
une aventure au cœur des légendes.
Francs-maçons, l’architecte Manini et le millionnaire ont ajouté au jardin
des secrets architecturaux à déterrer par les futurs recrutés lors d’un rite
d’initiation mystérieux. De nos jours, nous pouvons nous-même partir sur les pas
des initiés francs-maçons.
Tout commence quand en jouissant du paysage, le promeneur découvre entre les
pierres l’entrée cachée d’un puits. En descendant les escaliers en colimaçon du
puits, il fonce vers les ténèbres dans un voyage aux enfers comme dans la Divine
Comédie. Au fond du puits, l’initié doit choisir son chemin parmi plusieurs
tunnels sombres dont il ignore l’issue. Selon son choix, le tunnel aboutira à
la lumière ou s’avèrera une impasse et il devra recommencer.
Le puits initiatique
A la sortie des tunnels, l’initié pourrait
aboutir au portail des Gardiens ou à la Fontaine de la Vie. Il pourrait ensuite
continuer à découvrir d’autres secrets comme la tour d’Orient, la grotte de
Léda ou le temple égyptien cachés dans le jardin.
Léda et Zeus déguisé en cygne
Mosaïque du temple égyptien
Comme les tunnels du puits, les grottes labyrinthiques entrelacées de lacs
et de cascades attisent l’esprit d’exploration du visiteur et lui offrent des
paysages à couper le souffle tout au long de sa promenade.
Grotte à cascades
Uniquement aux yeux du visiteur vigilant qui lèvera son regard au plafond
juste après avoir franchi la porte de la chapelle, située à proximité du palais,
les symboles de la franc-maçonnerie seront ouvertement affichés.
Le plafond de la chapelle
Avant de partir, l’initié finit son voyage
en passant par l’allée des dieux où se dressent 9 héros et divinités
mythologiques : la chance représentée par Fortuna, la musique par Orphée, la
beauté par Vénus, la végétation par Flore, l’abondance par Cérès, Pan
protecteur des bergers, Dionysos dieu des vignes, Hermès le voyageur et Vulcano
le maître des feux. Enfin, au bout de l’allée, c’est à l’imposante statue du Lion
de Rouillard sculptée en 1837 que le voyageur fait ses adieux.
Dionysos Pan
Le lion de Rouillard
La visite de la Quinta da Regaleira est certainement magique. Manini a su
transformer en réalité le rêve de Monteiro tout en exécutant une architecture
franc-maçonne d’exception.
Photo de :
Hani Sawires
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